L’autodiagnostic – Épisode 1 : Pour quoi faire ?

Avertissement de contenu : mention de maltraitances médicales sans descriptions ni détails.

Cet article est la transcription de cette vidéo :


Introduction

Bonjour et bienvenue sur ma chaîne, c’est H Paradoxæ et aujourd’hui on va parler de l’autodiagnostic. Et oui, enfin !

Si vous ne me connaissez pas, bienvenue, je m’appelle Alistair, je suis handicapé, et sur cette chaîne je vulgarise des enjeux liés au handicap. Aujourd’hui plus précisément on va parler de l’autodiagnostic.

Pour commencer donc : c’est quoi l’autodiagnostic.

L’autodiagnostic, comme son nom l’indique c’est le fait de se diagnostiquer soi-même. C’est un terme qui peut être utilisé dans un certain nombre de contexte, par exemple on peut parler d’autodiagnostic pour un objet technologique qui est capable d’analyser ses propres bugs.

Mais en l’occurrence ce qui nous intéresse ici c’est l’autodiagnostic dans le contexte médical, c’est-à-dire le fait de poser un diagnostic soi-même sur une maladie ou une condition que l’on a. Et plus précisément, on va s’intéresser à ce qui concerne les handicaps et/ou maladies longues durées. Donc je ne parlerais pas de l’autodiagnostic pour des symptôme ou des maladies de courtes durées, comme par exemple se dire : « J’ai mal à la gorge j’ai sûrement une angine ». C’est techniquement un autodiagnostic, mais les enjeux sont un petit peu différents de ceux liés aux handicaps et aux maladies chroniques.

Dans cette vidéo j’utiliserai également l’expression « diagnostic officiel » pour désigner en opposition les diagnostics qui sont posés par les médecins.

L’autodiagnostic c’est une notion avec des enjeux qui sont divers, qui sont complexes, et qui font débat de plein de manières différentes. Par conséquent je ne vais pas du tout pouvoir traiter l’intégralité du sujet en une vidéo, et c’est pour ça que celle-ci est la première d’une série qui, si tout se passe comme prévu, devrait faire 4 épisodes. Aujourd’hui je vais me concentrer sur deux questions : « Comment ça se passe ? » et « A quoi ça sert ? » Y a plein d’autres choses à dire, et que j’aborderai dans d’autres vidéo, notamment « Est-ce que c’est fiable ? » Et à vrai dire je voulais commencer par là à la base, mais comme j’aurais pu m’y attendre si j’étais un peu moins con, il est en fait assez difficile d’expliquer si quelque chose fonctionne tant qu’on a pas expliqué ce que c’est. Du coup nous y voilà.

1 – La construction du déni

Déjà, comment se passe un autodiagnostic ?

Il y a beaucoup d’idée de reçues assez fausses sur le sujet, donc je pense qu’avant toute chose il est important de préciser un peu plus ce qu’on met derrière le mot autodiagnostic.

Quand on écoute des personnes peu renseignées et souvent réfractaires à l’autodiagnostic, on entend pas mal de discours qui tournent de près ou de loin autour de : « C’est n’importe quoi, les gens font un test sur internet et après il pense qu’ils sont autistes. » Et… c’est faux, en fait.

Globalement, même si honnêtement il y a beaucoup plus de personnes malades chroniques et/ou handicapées que ce qu’on imagine souvent, la majorité des gens ne le sont pas. Et plus important, il n’en reste pas moins que l’on considère, par défaut, que les gens ne sont globalement pas handicapés et/ou malades chroniques. C’est comme ça que la majorité des gens se perçoit, perçoit son entourage, et c’est dans cette idée qu’on a été élevé·es.

On grandit dans un milieu où, d’une manière générale, tout le monde considère qu’on peut faire plus ou moins la même chose que les autres, et où on ne nous demande pas de confirmer qu’on est pas handicapé·es. C’est plutôt aux personnes handicapées de se manifester pour demander un changement ou une adaptation si elles en ont besoin.

Et donc, en dehors de signes contradictoires, tout le monde vie en partant du principe qu’a priori, il n’est pas handicapé.

Ca c’est la première chose. La deuxième chose, c’est que « handicapé », dans la tête de plein de gens, c’est un peu un gros mot (même si, on s’entend bien, ça ne devrait pas l’être). D’une manière générale, on perçoit le handicap comme quelque chose de profondément négatif, de profondément destructeur, et il est souvent vécu comme une espèce de « condamnation » à vivre une vie de seconde classe.

Dans ce contexte-là, un individu lambda va : 1 ne pas se considérer comme handicapé et 2 espérer ne pas être et ne pas devenir handicapé

Or vous imaginez bien que lorsqu’on ne pense pas être concerné·e par quelque chose, et qu’on ne veux pas l’être, il est assez rare de devenir soudainement sûr qu’on l’est après avoir lu un article sur internet. Personnellement, je n’ai jamais rencontré une personne autodiagnostiquée qui l’ait été après des recherches aussi brèves. N’étant pas omniscient, je ne peux pas vous affirmer que ça n’existe pas, mais je peux dire que j’ai rencontré beaucoup beaucoup de personnes handicapées autodiag, et que je n’ai jamais vu ça.

Par contre, pour avoir été moi-même autodiag avant que mes diagnostics soient confirmés par des médecins, et pour avoir, encore une fois, rencontré beaucoup de personnes handicapées qui sont passées par l’autodiagnostic, je peux dire qu’il y a un schéma qui a l’air d’être plus ou moins toujours le même.

On a une personne qui a des difficultés. Par exemple elle est en échec scolaire, par exemple elle est en échec professionnel, par exemple elle n’arrive pas à faire la moitié de tout ce que ses collègues ou proches font parce qu’elle est trop fatigué pour le faire, ou qu’elle a trop mal pour le faire, par exemple elle a 25 ans et elle n’a jamais réussi à se lier d’amitié avec quelqu’un, par exemple elle est très anxieuse, par exemple elle est très dépressive… et souvent pour être honnête, un joyeux mélange de tout ça.

Comme on l’a dit plutôt, au début la personne va probablement considérer que tout le monde a plus ou moins les même difficultés qu’elle. A moins d’avoir grandi en sachant qu’on est handicapé, tout le monde se considère plus ou moins valide par défaut. Et plus généralement, en dehors même de la question du handicap, tant qu’on se retrouve pas confronté·e au fait que c’est faux, on a tendance à penser que tout le monde fonctionne plus ou moins comme nous.

Eventuellement la personne va peut-être se rendre compte qu’elle a l’air de galérer un peu plus que la moyenne, mais elle va probablement se dire des chose comme : « C’est juste que les autres masquent mieux leur difficulté que moi » ou « C’est juste que je suis faible et feignant », ou les deux. Parce que globalement, c’est ce qu’on va lui dire. Quand quelqu’un a des difficultés, en général on lui dit plutôt : « Il faut que tu fasses plus d’effort » que « Tu penses pas que tu es handicapé·e peut-être ? »

Je vous raconte pas le nombre de gens qui m’ont dit des trucs comme : « Ah je savais pas que j’avais une malformation aux pieds, je pensais juste que j’étais con et que je savais pas marcher. » Je connais même des personnes en fauteuil roulant qui m’ont déjà dit : « Ah tu penses que je suis handicapé·e ? Je pensais que j’étais juste nul·le. »

On a donc tout un tas de gens, qui sont handicapés, mais dont le moment où eux, et éventuellement les autres, s’en rendent compte a été massivement retardé par une culture dans laquelle face à quelqu’un en difficulté on favorise le fait de dire : « Fait plus d’effort, t’as pas de raison d’y arriver moins bien que les autres c’est sûrement de ta faute » plutôt que de se demander si la personne a des limitations particulières.

Vous vous doutez bien que quand on a vécu, 15, 20, 50 ans en étant handicapé sans le savoir le fait d’éventuellement réaliser qu’on nous a fait croire toute notre vie qu’on était des ratés alors qu’en fait on était malade et qu’on aurait pu avoir de l’aide à la place des insultes, c’est quelque chose de terrifiant, et d’infiniment douloureux, et rageant, et frustrant.

Alors évidemment, inconsciemment en général, on a besoin de se protéger de ça, et ça peut passer par le fait d’adhérer profondément aux mensonges qu’on va nous dire : « Tu es feignant. », « Ca marcherait si tu faisais plus d’effort. », etc, pour créer une espèce de mur qui va cacher la violence de ce qui nous arrive réellement.

Parce que même si c’est pas viable sur le long terme, à l’instant T, c’est souvent plus facile de se sentir coupable, que de réaliser que toutes les personnes en qui on a confiance nous ont menti toute notre vie et ont peut-être endommagé irrémédiablement notre santé.

Note : Je parle de la souffrance du retard de diagnostic, car les personnes autodiagnostiquée sont justement celle qui n’ont pas reçu tôt de diagnostic officiel, et sont donc la population qui nous intéresse ici. En aucun cas cela présuppose que les personnes qui ont eu un diagnostic tôt sont toujours privilégiées dans leur traitement, elles subissent parfois d’autres violences spécifiques.

2 – La rencontre avec le handicap

Ces personnes handicapées à leur insu ont donc généralement construit un mur plus ou moins épais entre elle et l’idée qu’elles pourraient être handicapées. Et un jours ces personnes-là tombent sur de la ressource sur le handicap, ou un handicap en particulier. Des fois par hasard. Des fois parce qu’on leur envoie en leur disant « Eh j’ai lu ça, ça m’a fait penser à toi ». Des fois en googlant leurs difficultés en espérant trouver des solutions. Souvent un mélange de tout ça.

Est-ce que vous pensez vraiment qu’un petit article sur internet va permettre de faire s’effondrer le mur ?

Absolument pas !

Le parcours est plutôt le suivant :

  • Lecture d’un premier article sur le handicap : « Ah tiens, ça me parle, mais bon, on lit n’importe quoi sur internet, c’est sûrement un article qui est fait pour que tout le monde s’y reconnaissent. »
  • Lecture d’un deuxième article sur le handicap : « Tiens ça aussi ça me parle… Ohlala je suis vraiment une personne horrible qui chercher à s’approprier le vécu des personnes handicapées alors que je le suis pas, moi je suis juste nul et feignant. »
  • Lecture de 5, 10, 15 articles sur le handicap : « C’est un peu bizarre que ça me parle autant, et ça expliquerait pas mal de choses, peut-être que je suis vraiment handicapé·e…

A ce moment là, la personne décide peut-être de parler de ses doutes à une personne de confiance ou sur internet.

Réponse : « N’importe quoi, c’est hyper grave ce que tu dis ! Le handicap c’est un sujet sérieux, tu peux pas dire comme ça que tu es handicapé·e, et puis tu l’aurais su plus tôt. » Game over, retour à l’étape du déni.

Quelque fois à un moment, la documentation sur le handicap finira par être beaucoup trop évidemment proche du vécu de la personne pour qu’elle continue à le nier, et le mur va commencer à s’effondrer.

Mais plus souvent ce qu’il va se passer c’est que la personne va rencontrer d’autres personnes handicapées, qu’elle va se lier avec elle parce que ben, forcément, elles ont plein de trucs en commun, et à un moment ces personne-là lui diront : « Effectivement je pense que tu es handicapé·e » ce qui permettra à la personne de déconstruire son mur intérieur, tout en ayant l’acceptation et le soutien de personnes qui ont déjà de l’expérience dans le domaine.

3 – L’autodiag et le pairdiag

A ce moment-là, si ses recherches l’ont menée à se retrouver particulièrement dans un ou plusieurs diagnostics, la personne va probablement s’autodiagnostiquer comme ayant ces handicaps-là. Et si des personnes qui ont le même handicap lui dise que effectivement, elles pensent ça aussi, elle aura aussi ce qu’on appelle un « pairdiag ». C’est évidemment pas quelque chose de formel où les personnes concernées par un handicap te disent : « Tu es officiellement handicapé·e comme nous. » mais plus un terme qui désigne que globalement ses paires, donc les personnes qui ont le même handicap qu’elle, la reconnaisse comme tel.

4 – Le diag officiel… ou pas !

Arrivé à ce stade-là, la personne handicapée va probablement chercher à faire officialiser son diagnostic par un·e médecin. Il y a plusieurs raisons à ça, et souvent c’est un mélange de plusieurs de ces raisons, et généralement ça tourne autour de :

  • Être sûr qu’on s’est pas trompé·e
  • Pouvoir le prouver à nos proches qui ne nous croient pas
  • Et surtout avoir accès à une prise en charge adaptée, que ce soit des soins, des aménagements ou les deux (souvent les deux).

Néanmoins, toutes les personnes avec un autodiag ne vont pas forcément chercher à avoir un diagnostic officiel tout simplement parce que toute n’en ont pas besoin. C’est notamment le cas des personnes qui ont d’autres diagnostics officiels, faux ou juste, peu importe, et qui avec ces diagnostics-là ont accès à un certain nombre de prise en charge.

Par exemple une personne autiste qui aurait eu un diagnostic erroné de schizophrénie, et qui via ce diagnostic aurait eu accès à des aménagements qui lui permette de travailler, ou une allocation qui compense le fait qu’elle ne peut pas travailler, et qui à côté de ça aurait réussi à aménager son quotidien correctement et serait soutenue par ses proches, n’a pas forcément d’utilité à faire un nouveau diagnostic.

Note : Je donne l’exemple d’une personne autiste avec un diagnostic erroné de schizophrénie. Cela arrive, et c’est ce dont je parle ici. Mais bien sûr il est tout à fait possible d’être autiste ET schizophrène (et cela peut engendrer le même genre de situation).

Ou une personne qui a une maladie physique qui est reconnue, et qui penses avoir aussi une maladie psy, mais qui, pareil, a déjà une reconnaissance suffisante de son handicap pour ne pas avoir besoin d’un nouveau diagnostic, ne s’en encombrera pas forcément.

5 – Médecins, aménagements et autodiags

Tout cela s’ajoute généralement à une approbation médicale.

C’est une idée reçue courante mais non, être autodiag ne veut pas dire qu’on en a pas parlé à des médecins ou qu’ils ne sont pas d’accord avec nous.

Pour reprendre mon exemple, une personne avec un diagnostic erroné de schizophrénie peut tout à fait dire à san psy : « Ecoutez, moi je pense que je suis pas schizophrène, mais je pense que je suis autiste » et que san psy lui dise : « Moi je n’ai pas les capacités pour vous diagnostiquer officiellement, mais on peut en parler, et effectivement votre profil semble correspondre. » Et cette personne pourra avoir une prise en charge et un suivit psy qui est le même que si elle avait un diagnostic officiel d’autisme, même sans.

Note : Quand je dis « peu tout à fait dire à son psy » je ne veux pas dire que c’est possible en toute circonstance, et que ça va forcément marcher, jusque c’est possible dans certain cas.

Pour les douleurs chroniques j’ai fait pareil, j’ai dit à mon kiné : « Ecoutez c’est pas encore confirmé mais moi je pense vraiment que j’ai ça. » et il m’a dit : « Ok on va faire la prise en charge qui est conseillée pour cette maladie si ça marche, tant mieux, si ça marche pas, tant pis on essayera autre chose, mais de toute façon pour l’instant c’est soit ça soit on a aucune idée de ce que vous avez donc ça se tente. »

Par ailleurs, il est important de savoir que, légalement, on a pas besoin d’un diagnostic officiel pour demander des aménagements, parce que les aménagements dépendent des symptômes et des difficultés, pas d’un diagnostic. Ainsi, à partir du moment où un médecin constate qu’il y a des symptômes et des difficultés, même s’iel ne pose pas de diagnostic dessus, même s’iel ne nomme pas de cause, des aménagements peuvent être demandé : à la MDPH, à l’employeur·euse, au lieu de scolarisation, etc. Évidemment dans la pratique les diagnostics officiels aident à appuyer la demande, mais ils ne sont pas légalement requis.

6 – Les obstacles au diagnostic officiel

Il y a aussi un certain nombre de personne autodiag qui aimeraient faire les démarche de diagnostic officiel, mais ne le peuvent pas, pour tout un tas de raison.

Il faut bien comprendre que, ça va dépendre des diagnostics, mais en général le parcours pour se faire diagnostiquer un handicap ou une maladie chronique est très compliqué.

Parmi les obstacles qu’on va rencontrer, il va y avoir notamment le prix. Personnellement mon diagnostic d’autisme m’a couté 650€, absolument pas remboursé par la sécurité sociale. Et pour ma maladie chronique, j’ai plus les chiffres exacts en tête, mais j’ai eu pour environs de 700€ de dépassements d’honoraires, c’est-à-dire que c’est ce que j’ai payé en plus de tout ce qui m’est remboursé. Au total, avec ce qui m’a été remboursé c’est plutôt 1500€.

Ensuite il va y avoir les refus de soin. Beaucoup de personnes handicapées ont rencontré des médecins qui ont tout simplement nié qu’elles étaient handicapées, ou s’iel ne l’ont pas nié n’ont pour autant pas posé de diagnostic.

Personnellement j’ai la chance d’avoir une médecin traitante qui est très à l’écoute, qui n’a jamais nié mes douleurs, mais qui malgré ça, après m’avoir fait passer des tests standard sans résultats ne m’a rien proposé d’autre et qui m’a en gros répondu : « Mais qu’est-ce que vous voulez que je fasse ? » quand je lui ai demandé qu’elle serait la prochaine étape de ma recherche de diagnostic. Et c’est parce que moi j’ai dit : « Je pense que j’ai ça, je veux être testé pour ça. » et que j’ai insisté, qu’elle a accepté de me faire la lettre pour que je sois testé, et sans ça je n’aurai toujours pas de diagnostic (parce que oui, j’avais raison au final). Et et tout ça alors même que j’avais des diagnostics officiels pour plusieurs maladies qui sont couramment trouvées avec cette maladie-là. Mon profil était vraiment typique et cohérent, et la maladie n’était même pas rare, donc ça n’aurait vraiment pas dû être difficile.

Et pourtant malgré tout ce que je viens de vous dire, je n’ai jamais de ma vie rencontré une personne avec la même maladie que moi qui ait été diagnostiqué aussi facilement et rapidement que moi. Pour vous vous dire comment c’est le parcours du combattant d’habitude.

Le troisième obstacle ça va être le temps : un diagnostic ça peut mettre des années à arriver, même quand on fait activement les démarches, particulièrement si on a pas d’argent, parce que plus c’est cher, moins y a de temps d’attente, et si tu veux aller dans les structures gratuites, la liste d’attente se compte souvent en années. Donc tu peux absolument être autodiagnostiqué·e, que tes médecins qui te croient, être activement en train de chercher un diagnostic, et quand même vivre des années en étant « juste » autodiagnostiqué·e.

Et enfin un quatrième paramètre qui peut empêcher le processus de diagnostic officiel c’est les traumatismes médicaux. Un certain nombre de personnes handicapées ont vécu des violences médicales et/ou psychiatriques, que ce soit des enfermements, des traitements non-consentis, des mutilations, des viols, etc. Dans ce contexte, un certain nombre de personne vont considérer qu’il est moins dangereux pour leur santé de gérer leur maladie seule, que de se confronté à un milieu qui les a violentées et traumatisées par le passé, et malheureusement elle n’ont pas forcément tort.

7 – Le rôle de l’autodiagnostic dans le diagnostic officiel

Et évidemment il y a aussi tout un tas de personne autodiag, qui veulent avoir un diagnostic officiel, et qui, à la fin de leur parcours, l’auront. Mais ça ne veut pas dire que dans ce cas là l’autodiagnostic ne sert à rien.

Comme on l’a dit, les démarches sont longues et on n’est pas moins handicapé·e tant qu’on a pas de diagnostic officiel, on l’est même généralement plus parce qu’on manque de soin et d’aménagement adaptés. Et pendant ce temps, qui je le rappel peut durer des années, l’autodiag permet de chercher des ressources et du soutien pour mieux adapter notre quotidien. Il permet d’adapter ou de commencer les soins comme je l’ai dit plus tôt et comme il permet potentiellement de mieux comprendre et de mieux verbaliser nos symptômes, il aide aussi à demander des aménagements.

En plus de ça, l’autodiagnostic est utile, et même souvent nécessaire au diagnostic officiel. Ma médecin traitante n’avait pas l’intention de me tester pour la maladie que j’ai au final, parce qu’elle ne trouvait pas que mon profil pouvait correspondre. Si je ne m’étais pas autodiagnostiqué, et si je n’avais pas insisté auprès d’elle, je ne me serai jamais retrouvé devant des spécialiste de cette maladie et je n’aurai jamais eu de diagnostic.

Pour faire un diagnostic, en tout cas dans le cadre d’un diagnostic physique le ou la médecin généraliste doit prescrire les tests. Mais s’iel ne connait pas la maladie en question, parce qu’iel n’en a jamais entendu parlé, ou parce que ses connaissances sur le sujet sont vieilles et erronées et qu’iel ne les a pas mises à jours, il est évident que, sans demande de la personnes handicapée, lae médecin de ne saura pas forcément prescrire les tests qui permettent de diagnostiquer la maladie en question ou qui permettent juste d’orienter vers un nouveau diagnostic.

Il est à noter que ce problème n’est pas aussi prévalant pour tous les diagnostics. Certains sont plus connus et plus testés que d’autres et c’est ce qui fait que beaucoup de personnes ont l’impression qu’il y a des « modes » dans l’autodiagnostic. Ils voient beaucoup d’autodiagnostic des mêmes maladies et en déduise qu’on se suit toustes les un·e les autres. Il s’agit juste des diagnostics qui d’un côté sont trop peu recherché spontanément par les médecins pour pouvoir être posé sans l’autodiag, et de l’autre de diagnostics sur lesquels il y a suffisamment de ressources et de soutien pour pouvoir faire l’objet d’un autodiagnostic.

C’est pour ça notamment qu’il y a beaucoup d’autodiagnostic pour l’autisme et le syndrome d’Ehlers-Danlos par exemple. Ce sont des handicaps qui : 1 ne sont pas rares, 2 sont bien documentés et ont de grosses communautés de patients, et 3 ont des démarches de diagnostics officiels très compliquées, très longues et potentiellement très chères.

En comparaison par exemple moi j’ai une discopathie, donc un disque intervertébral écrasé donc parfois pince le nerf et c’est douloureux. Je suis allé voir ma médecin, je lui ai dit : « J’ai mal là. », elle m’a dit : « Faites une radio. », et la semaine suivante j’avais un rendez-vous pour ma radio et à la fin du rendez-vous le mec m’a dit : « Ah oui vous avez ça regardez, ici. » Et paf ! J’avais un diagnostic officiel. Donc FORCEMENT oui on rencontre plus d’autodiagnostic d’autisme que d’autodiag de discopathie, pas parce que l’autisme est à la mode, mais tout simplement parce que l’autodiagnotic de discopathie ne sert à rien. C’est observable, c’est immédiat, c’est gratuit et c’est des test que les médecins vous feront passer spontanément si vous en exprimez les symptômes.

Conclusion

L’autodiagnostic est un processus qui est long et approfondi. Ce n’est pas quelque chose qui se fait en quelques en jours, ou même quelques semaines. Un autodiagnostic est un processus qui prend généralement des mois, voire parfois des années. Moi entre le moment ou je me suis dit : « Je crois que j’ai des problèmes psy. » et le moment où je me suis dis : « Je suis autiste. » Il s’est écoulé 4 ou 5 ans.

Et si vous avez l’impression que l’autodiag de quelqu’un sort « de nulle part » et que vous n’avez rien vu venir, ça ne veut pas dire que le processus qui l’a fondé a démarré la veille, mais sûrement juste que, avant ce jour, la personne en question a préféré garder ses démarches privées pour X raisons probablement très valables.

C’est aussi un processus qui n’est pas du tout aussi solitaire que ce que l’on s’imagine souvent. Les personnes autodiagnostiquées sont quasi systématiquement entourées d’autres personnes handicapées qui les aident et les soutiennent dans leur démarche, et elles sont aussi couramment entourées par des professionnel·les de santé.

Ainsi, la limite entre l’autodiag et le diagnostic officiel n’est pas non plus aussi claire que ce que l’on tend à croire ; et leurs débouchées de même. Suivant les diagnostics, le contexte dans lequel l’autodiag est fait et l’accompagnement qui l’entoure, un autodiag peut tout à fait mener à des prises en charges autant médicales, que paramédicales, qu’administratives.

Dans une majorité de cas, l’autodiag a vocation à déboucher sur un diagnostic officiel, et même lorsque ce n’est pas le cas, il tout de même vocation à déboucher sur du soin d’un manière ou une autre.

L’autodiagnostic, comme n’importe quel diagnostic d’ailleurs, est un outil, et son sens et son utilisation réside dans son utilité. Lorsque que, pour déboucher sur une prise en charge adaptée et efficace, il a besoin d’être doublé d’un diagnostic officiel, dans la mesure du possible, il le sera. Et quand ce ne sera pas possible, une prise en charge, même partielle ou informelle, sera quand même recherchée.

Dans le cas où l’autodiagnostic ne nécessite pas forcément un diagnostic officiel pour que la personne ait accès à la prise en charge dont elle a besoin, un diagnostic officiel ne sera pas forccément recherché, ni par la personne, ni par ses soignant·e·s, parce qu’il n’est tout simplement pas nécessaire. Et ce n’est pas grave. Parce que l’objectif n’est pas de dépendre à tout prix du mot final du corps médical, tout comme l’objectif n’est d’ailleurs pas non plus de se débarrasser du corps médical à tout prix. L’objectif c’est la santé, l’autonomie et le bien-être des personnes handicapées. A partir de là, si un diagnostic permet efficacement d’atteindre ces objectifs, son origine devient secondaire.

Le choix de l’autodiagnostic, ou du diagnostic officiel, ou de tous les parcours qui se trouvent entre ces deux pôles, c’est juste le résultat de ce qui est possible et efficace pour une personne donnée, dans un contexte donné. Et c’est ça qui compte.

Outro

J’espère que cette vidéo vous aura permis de comprendre un peu mieux les enjeux qu’il y a derrière le concept d’autodiagnostic. Même si évidemment il ne s’agit que d’une introduction au sujet et qu’encore beaucoup d’autres choses peuvent être dites. Si c’est le cas, je vous invite le partager autour de vous.

Avant de partir si vous avez encore une minute et que vous en avez les moyens je vous rappelle l’existence de mon uTip, qui est la plateforme sur laquelle vous pouvez soutenir mon travail. Actuellement Youtube est mon travail a plein temps, c’est l’argent avec lequel je mange, donc c’est vraiment important ! Le lien est ici : utip.io/hparadoxa

Sur ce, je vous souhaite une bonne fin de journée, et à dans deux semaines !

Annexes

Me soutenir : http://www.utip.io/hparadoxa

Boutique : http://www.utip.io/hparadoxa/shop

Twitter : http://www.twitter.com/HParadoxa

Facebook : http://www.facebook.com/HParadoxa

Ma chaîne : http://www.youtube.com/hparadoxa

Instagram : @hparadoxa

Le professeur Hamonet (un spécialiste du SED) témoigne que beaucoup de ses patients consulte grâce à l’autodiaggnostic, aidés par internet entre autres : http://claude.hamonet.free.fr/fr/art_sed_clinique.htm

Vous pouvez consulter les hastag #JeSuisIntersexe #LaPsychophobieEnHPCEst #10AnsDEtudes et #BalanceTonStage pour des témoignages et informations sur les maltraitances médicales et psychiatriques.

La chaîne de Yamina qui parle de maltraitance médicale et psychiatrique, notamment de médecin qui nie les diagnostics même officiel : https://www.youtube.com/c/YaminaHsaini

Mon masterpost sur les témoignages d’erreurs diagnostics : https://alistairh.fr/index.php/masterpost-erreurs/

La transcription de l’épisode suivant : https://alistairh.fr/index.php/autodiag-2/

0 Comments on “L’autodiagnostic – Épisode 1 : Pour quoi faire ?

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*